Jean Calvin ouvre son Institution de la religion chrétienne par ces lignes : «Presque toute la sagesse que nous possédons, qui est, en définitive, réelle et véritable, présente un double aspect : la connaissance de Dieu et de nousmêmes1». Connaître Dieu, voilà l’ambition la plus noble, la réalité la plus motivante des chrétiens ! C’est précisément en ces termes que Jésus décrit la vie éternelle : «Or, la vie éternelle, c’est qu’ils te connaissent, toi, le seul vrai Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus-Christ» (Jn 17.3).
À quoi ressemble cette connaissance de Dieu ? Que vit celle ou celui qui connaît Dieu ? Qu’est-ce qui plaît au Seigneur ? Qu’attend-il de nous ? Mémoriser la Bible ? Sourire en toute circonstance ? Aller à l’église chaque fois que ses portes s’ouvrent ? Prier en extase ? Servir les pauvres ? Ressentir une communion intense et profonde à chaque temps de louange ? Imiter les Églises antiques dans leurs traditions ?
Il existe tellement de manières, au sein de la chrétienté, de définir la foi et ses pratiques, qu’on se demande parfois si nous parlons bien des mêmes réalités ! C’est précisément pour cela que Dieu ne nous a pas laissés seuls. Il s’est révélé.
D’une manière générale : la création témoigne de l’existence d’un Créateur, de son intelligence et de sa majesté ; la conscience du bien et du mal témoigne d’un Juge ; et l’histoire témoigne de la souveraineté et de la providence de Dieu. Si ces marqueurs sont intéressants, ils restent insuffisants pour répondre à nos préoccupations initiales. Ils parlent de Dieu sans le décrire suffisamment pour que nous l’aimions avec justesse. C’est pour cela que nous avons besoin d’une révélation spécifique. Dieu s’est donc révélé de manière toute spéciale par sa Parole écrite, la Bible, et par sa Parole incarnée, Jésus, Dieu-devenu-homme.
Notre sujet ici concerne la Parole écrite de Dieu, son autorité, et son rôle pour nous.
LA BIBLE ET SON STATUT
Le statut de la Bible découle de son origine. Ce sont des hommes qui ont pris la plume, ce qui lui confère authenticité, réalisme, et proximité avec nous. Et ces hommes ont été conduits par Dieu lui-même. Ce phénomène unique au monde par son ampleur et par la diversité des moyens employés donne à la Bible une autorité unique.
L’autorité d’un écrit humain
Il a semblé bon à Luc d’écrire son Évangile «après avoir tout recherché exactement depuis les origines» (Lc 1 : 3). L’Ecclésiaste s’est livré à des expériences très diverses au cours de sa vie et a eu à cœur de présenter les conclusions auxquelles elles l’ont conduit (Ec 1 : 12-13 ; 12 : 10). Jude était motivé pour écrire un traité sur le salut et s’est ainsi mis au travail (1 : 3) – avant d’être réorienté, comme nous le verrons dans la suite.
Chaque auteur (une quarantaine pour toute la Bible) a rédigé selon sa personnalité propre. Luc, médecin, a composé l’Évangile qui porte son nom et les Actes des Apôtres en un grec très travaillé. Pierre, artisan-pêcheur, s’exprime à l’aide de tournures très hébraïques. La personnalité austère de Jacques et de Jude se perçoit à la sévérité de leurs écrits. Jean révèle la chaleur et la finesse de ses perceptions par la tonalité et les thèmes qu’il développe. Chacun a écrit selon son époque et sa culture (cf. Ruth 4 : 7-8) : cela donne cette texture si humaine à l’Écriture sainte, gage d’authenticité.
Mais ces hommes avaient un statut particulier. Ils ont été mandatés pour rédiger la Bible. Ils portent le titre de «prophète» c’est-à-dire de «porte-parole» de Dieu (cf. Ex 7 : 1, comparer Ex 4 : 10-16). Ils reçoivent du Seigneur ce qu’ils annoncent à son peuple (cf. Am 3 : 7). Le Nouveau Testament reconnaît aussi des prophètes en David (Ac 2 : 30), Daniel (Mt 24 : 15) et Asaph (Mt 13 : 35). Pour l’ère chrétienne, ce sont les apôtres, ou ceux qui ont œuvré sous leur autorité, qui ont signé les écrits du Nouveau Testament. Ces apôtres ont confirmé, par différents signes, qu’ils avaient l’autorité de parler pour le Seigneur (Hé 2 : 3-4). L’Écriture s’est imposée d’elle-même, et les apôtres l’ont confirmée au peuple de Dieu qui l’a reçue comme telle. Et Dieu a conduit providentiellement l’histoire en sorte que les textes de l’Écriture soient reconnus comme faisant foi par la quasi totalité des communautés chrétiennes.
Les apôtres du Nouveau Testament ont donné à l’Église ce dont elle avait besoin : elle a donc été édifié sur «le fondement des apôtres et des prophètes» (Ep 2 : 20, 3.5). Ces hommes nous ont laissé un socle solide, parce qu’ils ont été conduits par le Seigneur en personne.
L’autorité d’un écrit divin
La Bible se présente aussi comme un écrit dont Dieu est l’auteur. Les arguments qui le soulignent sont trop nombreux pour être tous cités. Mais voici les propos les plus explicites de l’Écriture.
2 Timothée 3 : 16 est un classique du genre : «Toute Écriture est inspirée de Dieu». D’après le contexte (cf. le verset précédent), le terme «Écriture» (qu’on retrouve 51 fois dans le Nouveau Testament) fait référence à l’Ancien Testament, comme c’est le cas à chaque fois qu’il est utilisé dans le NT, sauf à deux reprises, où il désigne les écrits de Luc et de Paul (1 Tm 5 : 18 et 2 P 3 : 16), ainsi élevés au statut d’Écriture sainte. Paul a conscience que la Bible a été inspirée par Dieu. Non comme un poète, inspiré pour ses beaux mots. Car le grec est sans appel : l’Écriture vient de Dieu2 ; c’est Dieu lui-même qui a supervisé la rédaction des lettres qui constituent les écrits de la Bible3.
Pierre affirme que la «prophétie de l’Écriture» vient de Dieu : «c’est poussés par le Saint-Esprit que des hommes ont parlé de la part de Dieu» (2 P 1 : 19-21). Ainsi, pour Pierre au moins, tout l’Ancien Testament, mais aussi les écrits de ses collègues apôtres, avaient le sceau de l’autorité divine (cf. 2 P 3 : 16). Il met en avant l’activité de l’Esprit, qui a agi en sorte que ce que les auteurs humains ont écrit soit «prophétie de l’Écriture».
De tels versets sont compatibles avec la manière dont la Bible se présente elle-même. Bon nombre de sections de l’Ancien Testament sont introduites par la formule «ainsi parle l’Éternel», ou contiennent des formules comme «oracle du Seigneur» – «non moins de 3808 occurrences4». Certaines sections ont été rédigées sur ordre direct de Dieu (cf. Ex 17 : 14, És 8 : 1, etc.). Plusieurs auteurs se savaient inspirés par le Seigneur lui-même (cf. Jr 25 : 3, És 34 : 16, Ml 1 : 1, Ha 2 : 1). On devait obéir aux prophètes qui ont parlé comme si Dieu lui-même avait parlé (cf. 1 S 10 : 9, Jr 1 : 9). Jésus promet aux apôtres que le Saint-Esprit les enseignera, leur rappellera ses paroles (Jn 14 : 26) et les conduira dans toute la vérité (Jn 16 : 13), garantissant ainsi qu’ils écriront sans erreur.
La loi de Moïse est citée comme «l’Écriture» (l’article défini singularise l’expression) en 1 Timothée 5 : 18. Jésus argumente en présupposant l’historicité d’Adam et Ève (Mt 19 : 4), évoque le déluge (Lc 17 : 26-27), la destruction de Sodome et Gomorrhe ainsi que la transformation de la femme de Lot en statue de sel (Lc 17 : 28-29 ; 31-32), l’épisode du buisson ardent (Lc 20 : 37), le miracle de la manne (Jn 6 : 49), la préservation de Jonas dans le ventre du poisson (Mt 12 : 40), etc. C’est bien le Seigneur ou le Saint-Esprit qui parle dans l’Ancien Testament (cf. Mt 1 : 22; 22 : 43; Ac 1 : 16; Rm 9 : 25). Et Jésus promet aux disciples qu’ils se souviendront de ce qu’ils ont reçu pour l’enseigner à d’autres (Jn 14 : 26, 16 : 13-14). Toute l’Écriture vient de Dieu !
L’autorité d’un écrit de référence
La Bible tient donc son autorité du fait que Dieu a inspiré ses auteurs. Ce fait a de nombreuses conséquences. La première, c’est qu’elle est sans erreur (NDLR : le thème de l’inerrance sera abordé dans le prochain numéro). La seconde, c’est qu’elle est complète, et qu’il n’y a rien à y ajouter5. Elle n’a pas besoin d’être complétée – ni les sciences, ni une prétendue activité prophétique ne sauraient la compléter ou se substituer à son contenu. La troisième, c’est qu’elle est nécessaire et normative. On cite souvent 2 Timothée 3 : 16 sans considérer la fonction du texte qui est le produit de l’inspiration : «pour enseigner, pour convaincre, pour redresser, pour éduquer dans la justice, afin que l’homme de Dieu soit adapté et préparé à toute œuvre bonne» (3 : 17). La portée de cet objectif est immense. Tout homme, toute femme, qui veut servir son Sauveur doit considérer que l’Écriture qualifie à ce service (cf. 1 Tm 4 : 13, 16 pour l’enseignant, etc.).
Si la Bible fait autorité, alors elle est notre norme. C’est elle qui nous renseigne sur ce qui est vrai, sur ce que nous devons vivre individuellement et collectivement dans l’Église. C’est la Bible qui oriente notre action. Certes, il faut l’interpréter correctement. Les livres historiques nous apprennent ce que Dieu ou les hommes ont fait – sans que ce soit nécessairement à imiter (pensons au vœu de Jephté, ou au tirage au sort pour désigner l’apôtre remplaçant Judas !). Il faut prendre en compte les contextes particuliers (culturels, historiques, etc.). Mais le peuple de Dieu doit entretenir cette attitude fondamentale de respect pour la Bible. Car elle nous sert de cadre et nous oriente vers ce que Dieu aime, et nous empêche d’adopter ce qu’il n’approuve pas. Une haute estime de l’Écriture fait toute la différence.
L’autorité d’un écrit vivant
Certains traitent les évangéliques de «bibliolâtres» comme s’ils adoraient un livre et non la personne de Dieu. S’il est toujours possible de s’intéresser froidement à un texte, sans tirer les leçons de vie qui lui sont associées, ce n’est manifestement pas l’intention du Seigneur de l’Écriture. Paul dit à Timothée : «tu connais les Écrits sacrés ; ils peuvent te donner la sagesse en vue du salut par la foi en Christ-Jésus» (2 Tm 3 : 15) et l’apôtre Jean prononce une béatitude sur ceux «qui écoutent les paroles de la prophétie et qui gardent ce qui s’y trouve écrit ! » (Ap 1 : 3).
La Bible, par l’Esprit saint, est agissante dans la vie de ceux qui la lisent, l’étudient ou l’entendent lorsqu’elle est prêchée. Dieu promet qu’elle sera efficace (És 55 : 11). L’Esprit se sert de la Bible pour nous faire naître de nouveau (Jc 1 : 18, 1 P 1 : 23, cf. Lc 8 : 11). Elle est nourriture et protection (Dt 8 : 3, Mt 4 : 4), nous fait grandir et nous oriente (1 P 2 : 2). C’est la seule arme offensive de la panoplie du chrétien face aux manœuvres du diable (Ep 6 : 17). Elle examine les sentiments et pensées les plus intimes de l’être humain (Hé 4 : 13). Le plus grand mouvement de réveil de l’Ancien Testament a eu lieu sous Néhémie et Esdras. Leur activité était toute simple : «Ils lisaient distinctement dans le livre de la loi de Dieu et ils en donnaient le sens pour faire comprendre ce qu’ils avaient lu» (Né 8 : 8). Quelle puissance de Dieu se manifeste lorsque l’Écriture est enseignée et expliquée (cf. 8 : 9-12) !
LA BIBLE ET L’EXPÉRIENCE
L’importance de l’expérience
On oppose, à tort, l’Écriture à l’expérience. Le Nouveau Testament présente sans embarras une marche chrétienne qui se vit, qui s’expérimente, une communion vive de l’être à son Créateur devenu son Sauveur. Pierre écrit aux chrétiens persécutés : «Vous l’aimez sans l’avoir vu. Sans le voir encore, vous croyez en lui et vous tressaillez d’une allégresse indicible et glorieuse, en remportant pour prix de votre foi le salut de votre âme» (1 P 1 : 8-9). Expérience joyeuse, presque indescriptible.
Le disciple est engagé dans une relation avec le Dieu trinitaire rendue réelle par «la communion du Saint-Esprit» (2 Co 13 : 12) qui témoigne «que nous sommes enfants de Dieu» (Rm 8 : 16). Le «bain de la régénération» (Tt 3 : 5) à l’origine de la «nouvelle créature» (2 Co 5 : 17) engendre une modification radicale de la manière de vivre (1 Co 6 : 9-11, cf. Ep 2 : 1-5). Paul a prié qu’une illumination rende compréhensible les multiples dimensions de l’amour et de la puissance de Dieu pour ses enfants (Ép 1 : 17-19 ; 3 : 18-19). L’apôtre ambitionnait «de le connaître, lui, ainsi que la puissance de sa résurrection et la communion de ses souffrances, en devenant conforme à lui dans sa mort, pour parvenir, si possible, à la résurrection d’entre les morts» (Ph 3 : 10-11).
L’apôtre Pierre est lucide sur la portée limitée des expériences spirituelles, fussent-elles authentiques. Se référant à la transfiguration, il affirme avoir vu de ses propres yeux la majesté du Christ (1 P 1 : 16), avoir entendu «la gloire pleine de majesté» déclarer son amour au Fils (1 : 17-18). Certainement la plus formidable expérience qui soit ! C’est peut-être le moment que j’aurais voulu vivre si je devais choisir de participer à une scène des Évangiles… Non seulement cette expérience n’est pas à rechercher6, mais Pierre la met en contraste avec le témoignage supérieur de l’Écriture : «Et nous tenons pour d’autant plus certaine la parole prophétique» (1 : 19). L’adjectif souligne le caractère de stabilité ou de fermeté, de dignité, de certitude supérieure, de la Parole écrite, communiquée par l’Esprit saint (cf. 1 : 20-21). Si l’apôtre estime que la Bible est supérieure en certitude à la plus forte des expériences qu’il a vécues avec Jésus, à combien plus forte raison devons-nous chercher à sculpter notre spiritualité avec l’Écriture plutôt qu’avec l’expérience fluctuante des uns et des autres…
L’importance de l’évaluation de l’expérience
Parallèlement à ces encouragements à vivre le christianisme, le Nouveau Testament exige une attitude de discernement. Ni le monde spirituel, ni les expériences spirituelles, ne sont nécessairement d’origine ou d’approbation divine. Les propos de «l’esprit de Python» seraient applaudis dans bien des Églises chrétiennes, mais Paul ne discerne là rien moins qu’une influence démoniaque (Ac 16 : 16-17). Le diable, «ange de lumière», envoie des serviteurs déguisés en «serviteurs de justice» qui prêchent «un autre Jésus… un autre esprit» (2 Co 11 : 13-15 ; 11 : 4). L’apôtre Jean exhorte à ne pas se fier «à tout esprit» car la séduction des fauxprophètes opère au sein même de l’Église pour proposer une autre spiritualité que celle qui est conforme à l’enseignement apostolique (1 Jn 4 : 1-2 ; cf. 2 Jn 1 : 7). Paul débute son exposé sur les manifestations de l’Esprit par une mise en garde contre l’importation de conceptions païennes dans le culte chrétien : le Saint-Esprit conduit à glorifier Christ – un test majeur de l’authenticité de son action (1 Co 12 : 3 ; cf. Jn 16 : 14). Paul poursuit en recommandant l’amour du prochain comme motivation et validation des manifestations spirituelles, au lieu de la vanité des processions païennes (1 Co 13 : 1-3)7.
Écrivant aux Colossiens, il souligne que le sacrifice de Christ est pleinement suffisant (Col 1 : 19-20 ; 2 : 10, etc.) et que sont inutiles, voire dangereux, les exercices ‘prometteurs’ de ceux qui veulent réorienter la vie chrétienne selon des axes étrangers à l’Évangile (2 : 4-5, 16-17, 20-21). Jésus reproche à l’Église de Thyatire de laisser la fausse prophétesse Jézabel introduire des expériences mystiques ou des enseignements ésotériques qualifiés de «profondeurs de Satan» (Ap 2 : 20-24). Les expériences spirituelles, même présentées comme chrétiennes, peuvent être un terrain miné !
Tout ce qui brille n’est pas de l’or. Cet adage vaut également pour l’expérience spirituelle. Il n’y a pas si longtemps, une vague d’expériences nouvelles a renversé Églises et responsables. On affirmait que le Saint-Esprit œuvrait de manière nouvelle en produisant des rires incontrôlés, des imitations d’animaux, des extases prolongées accompagnées de mouvements saccadés. Pour justifier ce type de comportement, il fallait s’éloigner d’un attachement à la Bible. Un auteur est allé jusqu’à écrire : «Une adhésion littérale et rigide à la Bible n’est pas faite pour conduire à l’Esprit de réveil8». Pourtant, puisque la Bible est utile pour qualifier à «toute œuvre bonne», c’est d’elle que je tire ma qualification, pas de mes expériences.
Dire que la Bible fait autorité, c’est accepter qu’elle soit supérieure à notre intelligence naturelle. C’est lui donner le droit d’examiner nos convictions, nos sentiments, notre éthique, nos pratiques. S’opposer à son témoignage, c’est finalement renier la souveraineté de Dieu qui s’est révélée en elle et nous a fait part de sa volonté. Sola Scriptura, «l’Écriture seule» ! Elle est fiable. Et elle continuera à juger notre vie et nos ministères. Qui n’a pas eu à se repentir suite à la lecture ou l’étude de la Bible ? Hélas – ou heureusement – il m’a souvent été nécessaire de venir à la croix, pour confesser manquements, erreurs, péchés… C’est l’œuvre de l’Esprit de nous saisir pour nous permettre de revenir à ce qui honore Dieu (1 Jn 2 : 20, 27).
CONCLUSION
Les Églises ont tout à gagner à demeurer fermement attachées à la Bible. Voici quelques pistes à creuser pour favoriser l’impact de l’Écriture dans la vie de nos Églises, parce que précisément, elle fait autorité :
Évangéliser avec la Bible ! Apprenons à communiquer l’Évangile en partant du texte de l’Écriture. Soit avec un verset (Jn 3 : 16 ; Rm 3 : 23-24 ; Col 1.21-22) soit avec un passage (Ep 2 : 1-10 ; Lc 15 ; etc.) soit en plusieurs temps avec les chapitres clé de la Bible9.
Enraciner le disciple dans la Bible ! Il existe de nombreux outils à cette fin, et chacun a ses forces et ses faiblesses. J’ai trouvé très utile l’approche proposée par Neil Cole10 : deux ou trois personnes s’engagent à lire entre vingt et trente chapitres par semaine et se rendent redevables de ce qu’elles lisent. J’ai été émerveillé de constater la croissance spirituelle d’un nouveau-né en Christ qui commence ainsi sa vie chrétienne.
Prêcher la Bible ! Une bonne prédication dans l’Église proclame ce que Dieu a dit. Avec des explications, des illustrations, des applications, de manière pertinente et compréhensible. Mais cela doit être ce que la Bible dit ! Il arrive qu’on entende plus l’exégèse d’expériences personnelles, agrémentées de «je pense», ou de «ça me parle» ou de «pour moi»… Les prédicateurs sont appelés à suivre l’exemple de Néhémie (cité plus haut) et d’Esdras : «Car Esdras avait appliqué son cœur à étudier et à mettre en pratique la loi de l’Éternel et à enseigner en Israël la règle et le droit» (7 : 10). Le livre de Bryan Chapell est excellent pour apprendre à enraciner son message dans l’Écriture11.
Distinguer la Bible de notre culture ! Très souvent, les Églises «conservatrices» défendent une manière de vivre de leur Église – une culture – qui s’apparente parfois à une liturgie. Ce ne sont pas les formes (musique, nombre et type de rencontres, etc.) qui sont à défendre, mais les vérités fondamentales, les pratiques que Dieu exige – même si la forme de ces pratiques peut changer.
Discerner comment la Bible répond aux questions actuelles. L’évolution de la société pose de nombreuses questions éthiques touchant par exemple au sujet du mariage, aux questions de bioéthique, ou à la notion de richesse et de solidarité. Il est crucial que les anciens des Églises prennent le temps d’examiner ces questions en formulant des réponses qui s’appuient sur l’enseignement biblique, et d’en montrer la pertinence.
Avant de rejoindre son Père, notre Seigneur a prié pour ses disciples. «Sanctifie-les par la vérité : ta parole est la vérité. Comme tu m’as envoyé dans le monde, moi aussi je les ai envoyés dans le monde» (Jn 17 : 17-18). Cette vérité nous met à part. Elle doit être comprise et proclamée. Jésus continue : «je prie […] pour ceux qui croiront en moi par leur parole» (17 : 20). Il serait triste que nous ne sachions transmettre à la prochaine génération une vision noble de l’autorité de l’Écriture.
FLORANT VARAK
NOTES
1 Jean Calvin, Institution de la religion chrétienne (adapté en français moderne par Marie de Védrines et Paul Wells), Kerygma / Excelsis, 2009, p. 3.
2 Théopneustos est un mot composé unique dans le NT : le nom Theos (Dieu) s’associe au verbe pneô (souffler). L’ensemble évoque une forme passive qui dénote le résultat : ce qu’il a ‘soufflé’, et qui porte bien sa marque.
3 Puisque le verbe «être» n’est pas présent, selon l’usage habituel du grec dans ces constructions, plusieurs auteurs libéraux l’ont placé ailleurs : «toute Écriture utile est inspirée de Dieu». C’est grammaticalement possible, mais difficile. Il faut éliminer le «et» qui suit, alors qu’il est logique de lier les mots «inspirée» et «utile» (cf. 1 Tim 4 : 4) ; il est impossible de distinguer une Écriture utile d’une Écriture inutile dans la pensée de Paul et du NT. Plus d’arguments sont à découvrir dans Alfred Kuen, Encyclopédie des difficultés bibliques 2e volume, les lettres de Paul, Editions Emmaüs, 2003, p. 658-661.
4 Sylvain Romerowski, Manuel pour le cours de Doctrine 1, Institut Biblique de Nogent, 2010, p. 33.
5 Le canon est clos. Le principe de ne rien ajouter est fréquent tout au long de la Bible (cf. Dt 4 : 2 ; Pr 30 : 5-6 ; Ap 22 : 18-19).
6 1 Pierre 1 : 8 cité plus haut est explicite sur ce qui est normatif à cet égard : «Vous l’aimez sans l’avoir vu. Sans le voir encore, vous croyez en lui…»
7 Les prêtres et prêtresses honorant Cybèle traversaient Corinthe en procession, balbutiant des paroles incohérentes en état de transe, ce qui était compris comme les oracles des dieux, le tout accompagné de tambours, de cymbales et de trompettes, cf. Edith HAMILTON, La Mythologie, Verviers : Editions Marabout, 1978, p. 403.
8 Guy Chevreau, Embrase nos cœurs, Éditions Carrefour, p. 61.
9 Nous avons créé un outil avec 12 chapitres qui donnent le «fil rouge» de la Bible et je serais heureux de le donner à quiconque voudrait l’utiliser ! [fvarak@grace-lyon.org].
10 Neil Cole, Une Bible, un café, des disciples, Éditions CLE, 2009.
11 Bryan Chappell, Prêcher, l’art et la manière, Excelsis, 2009.