Loyer fiscalisé ou avantage en nature concédé?
L’Église, association cultuelle, peut être propriétaire d’un logement qu’elle met à disposition du ministre du culte. Cela fait effectivement partie de son objet exclusivement cultuel qui comprend « l’entretien du ministre du culte1 ».
L’association cultuelle peut choisir de percevoir des loyers correspondant à l’occupation dudit logement par le ministre du culte ou de déclarer cet usage comme un avantage en nature concédé au pasteur. Mais le régime fiscal diffère selon le cas.
Loyers perçus par l’Église
Les loyers perçus par l’Église sont imposables au titre de l’impôt sur les sociétés au taux réduit de 24 %.
Le principe de l’imposition des loyers au taux de 24 %
– Imposition des loyers d’habitation: si l’association cultuelle n’est pas redevable de l’impôt sur les sociétés pour les revenus des locaux servant à l’exercice du culte, elle l’est pour les locaux à usage d’habitation2 . Les logements loués au ministre du culte doivent donc faire l’objet d’une déclaration de revenus fonciers sur le formulaire Cerfa n° 2070 Impôts sur les sociétés
– collectivités publiques ou privées agissant sans but lucratif, dans la rubrique revenus des propriétés bâties et non bâties.
– Le taux réduit de 24 %: le taux d’imposition des revenus locatifs est de 24 %. L’article 219 bis du CGI précise: «Par dérogation aux dispositions de l’article 219, le taux de l’impôt sur les sociétés est fixé à 24 % en ce qui concerne les revenus visés au 5 de l’article 206, perçus par les établissements publics, associations et collectivités sans but lucratif ».
L’instruction fiscale de décembre 2006 confirme ce principe de taxation à 24 % des revenus locatifs3 .
Revenu imposable et charges déductibles
S’agissant des revenus fonciers, le revenu imposable est égal au montant des recettes (les loyers de l’année), déduction faite de certaines charges se rapportant audit logement.
Parmi les charges déductibles4 , on notera:
– Les dépenses de réparation et d’entretien;
– Les dépenses d’amélioration du logement;
– La taxe foncière;
– Les intérêts de l’emprunt au prorata du logement par rapport à l’ensemble du bâtiment;
– Les primes d’assurance;
– Les frais de gestion (par exemple en cas de copropriété).
Sanctions possibles en cas de non-déclaration des loyers encaissés par l’Église?
S’il y avait contrôle fiscal, l’Église qui n’aurait pas déclaré les loyers pourrait être sanctionnée pour défaut de déclaration d’éléments permettant le calcul de l’impôt.
Il devrait d’abord y avoir réparation par le paiement du supplément d’impôt non déclaré. Le délai de reprise de l’administration fiscale étant de 3 ans, il faudrait donc considérer les sommes non déclarées sur les trois années précédentes.
Ensuite, il pourrait y avoir des pénalités par le paiement d’intérêt de retard (0,40 % par mois) et l’application d’une majoration supplémentaire variable selon les cas.
S’ajouterait le risque que l’administration estime que l’association s’est frauduleusement soustraite à l’impôt et porte plainte pour fraude fiscale. La sanction recherchée serait alors sans doute une amende.
Le logement déclaré en avantage en nature
Nous attirons votre attention sur la possibilité de déclarer le logement du pasteur en avantage en nature.
Quand l’Église passe le logement du ministre du culte en avantage en nature, elle n’a plus à l’inclure dans son revenu imposable (à 24 %). Cet avantage en nature doit cependant être inscrit sur la feuille de libéralité du ministre du culte.
Ce choix n’est pas sans incidence pour l’Église et pour le ministre du culte. Il convient de tenir compte des faits suivants :
– L’avantage en nature peut être valorisé de deux manières, soit en fonction du loyer moyen des alentours, soit selon un forfait (barème sur le site de l’Urssaf), l’évaluation étant alors moindre.
– L’avantage en nature vient augmenter l’assiette des cotisations sociales pour les pasteurs qui sont au régime général. (Ceux qui sont à la Cavimac paient un forfait: il n’y a donc pas d’incidence.)
– Dans tous les cas, le montant de l’avantage en nature viendra augmenter la rémunération imposable du ministre du culte.
Quand le pasteur occupe le logement de l’association cultuelle, il peut donc s’avérer préférable d’inscrire celui-ci en avantage en nature sur son attestation de libéralité.
Nathalie Klopfenstein et Nancy Lefèvre,
membres de la commission juridique.
NOTES
1 Conseil d’État 14 novembre 1997.
3 Elle précise à l’article 144 que les recettes provenant de la gestion du patrimoine (loyers, intérêts…) ne sont pas à prendre en compte pour l’appréciation de la limite des 60 000 euros (seuil des activités lucratives).