Au début de ma vie chrétienne, j’étais enfin content d’être libéré dans le domaine de la prière: je n’avais plus peur d’un Dieu que je vouvoyais auparavant. Par le sang versé, j’étais entré dans son intimité. Je n’avais plus l’obligation de réciter une prière puisque je parlais désormais avec un véritable ami. Je ne me triturais plus l’esprit pour dire les mots justes au bon moment, puisque mon interlocuteur qui est en même temps mon créateur, me connaissait parfaitement! Enfin, j’étais libre de dialoguer … donc de prier.

Les années ont passé et j’ai appris, en écoutant un message par-ci, un séminaire par-là, l’un ou l’autre ancien de l’Église, en découvrant un livre meilleur que les autres … que la prière n’est peut-être pas aussi simple. J’ai appris que ma prière doit être structurée, qu’elle ne ressemble pas à une liste de course, qu’elle ne dévoile pas ma vie, qu’elle ne parle pas des autres, qu’elle ne soit pas répétitive, qu’elle ne soit pas une négociation, qu’elle soit contemplative, louange, adoration, en cinq points ou sept pour d’autres, qu’elle soit empreinte de foi, qu’elle soit un dialogue avec Dieu, qu’elle n’influence pas Dieu dans ses objectifs. À vrai dire, pourquoi prier puisque Dieu sait à l’avance! Après 35 ans de vie chrétienne, serais-je revenu à reprendre simplement de Jésus dans Matthieu 6 « voici comment vous devez prier ».

Pendant toutes ces années, j’ai cherché ce que Dieu voulait au travers de sa Parole en examinant les dialogues des uns et des autres et j’ai découvert:

  • La violence des propos d’Habakuk envers Dieu en ces termes: « Jusqu’à quand j’ai crié et tu n’écoutes pas; J’ai crié à toi à la violence et tu ne secours pas » (1.2). Voire son impertinence quand il dit: » j’étais à mon poste, et je me tenais sur la tour; je veillais pour voir ce que l’Éternel me dirait, et ce que je répliquerais après ma plainte » (2.1);
  • La négociation d’Abraham avec Dieu pour Sodome: « Dis, Dieu, s’il y avait seulement 40 justes … , et s’il n’y avait que … »
  •  Le persévérant discret qu’est Néhémie qui a jeûné et prié jour et nuit pendant quatre mois sans que son entourage s’en rende réellement compte;
  • Le provocateur Daniel qui priait à la vue de tous sachant que cela était en contradiction avec la loi de son pays;
  • L’impatient Paul qui n’attendait pas la réponse de Dieu mais partait dans toutes les directions pour annoncer l’Évangile jusqu’au moment où Dieu lui a donné la vision du Macédonien (Actes 16);
  • Que dire d’Anne en prière qui avait un comportement qui ressemblait plus à celui d’une femme ivre (1 Samuel 1.13 et suivant)? De cette réunion de prière autour de Jésus avant son arrestation où tout le monde dormait? De David qui s’expose « sentimentalement » au travers des Psaumes? De Jonas dont certains osent prétendre que sa prière de foi du chapitre 3 devrait se trouver à la fin du livre comme une prière de remerciement? Et de tous ces hommes et ces femmes qui ont lutté dans la prière et qui n’ont jamais eu de réponse favorable et «n’ont même pas obtenu ce qui leur était promis, Dieu ayant en vue quelque chose de meilleur pour nous, afin qu’ils ne parviennent pas sans nous à la perfection » (Hébreux 11.39b et 40)?

Puis-je me permettre de dire malgré tout, que chacun a œuvré selon son caractère, selon sa proximité avec le Père et aussi selon ce que le Père a voulu agréer Lui-même en leur donnant une inspiration propre? Peut-on suggérer qu’avec le temps et les circonstances, les uns et les autres n’avaient pas toujours la même manière de s’adresser à Dieu même si Celui-ci les a déclarés être des « hommes selon son cœur ».

Les hommes, créés à l’image de Dieu, gardent aussi cette notion de péché qui entache leur vie et leur relation avec le Père en permanence. Dieu, Lui, usera de grâce et de pardon afin que la prière d’un homme ait son utilité au temps marqué par Dieu. Néanmoins, je reste convaincu que tous ces personnages cités en exemple plus haut, avaient la même recherche spirituelle: celle de plaire à Dieu et de faire avancer le peuple de Dieu dans la bonne direction en allant jusqu’à « prendre en charge » le péché du peuple pour en demander pardon au Seigneur. Et presque tous ces intercesseurs ont vu des choses extraordinaires se produire pour eux et ceux pour lesquels ils ont combattu. Pour les autres, ils n’ont humainement parlant, pas reçu leur lot de réjouissances mais pour ici-bas seulement!

J’ai envie d’une chose à ce jour: reprendre ma liberté dans la prière, ne plus me tracasser pour la formulation, le temps passé, le fait de mettre ou non la pression sur mon Seigneur. N’ai-je pas plus à gagner dans ma relation avec Christ de passer du temps dans la prière que de trouver les « bonnes manières » pour le faire et ainsi. .. ne plus le faire? De mon amour pour Christ va dépendre le dialogue que j’ai avec Lui!

François LONGERON
pasteur à Villers-les-Nancy et directeur de Opération Droit de Savoir (ODDS)