Le 25 mai 2009, une circulaire du Ministère de l’Intérieur concernant les Édifices du culte a été adressée aux Préfets. Elle énonce de manière générale que « la liberté d’exercice du culte trouve son corollaire dans le droit de disposer, pour chaque culte, de locaux adaptés à la célébration publique du culte ». Elle rappelle l’état du droit concernant les édifices du culte, notamment s’agissant de la mise à disposition des locaux communaux aux associations pour un usage cultuel. La question est d’actualité pour de nombreuses associations en recherche de locaux, pour des événements ponctuels ou pour leurs activités régulières. Mais le refus des mairies n’est pas rare… Nous proposons de rappeler le cadre juridique actuel en la matière.
Rappel de la loi
Article L. 2144-3 du code général des collectivités territoriales : « Des locaux communaux peuvent être utilisés par les associations, syndicats ou partis politiques qui en font la demande. Le maire détermine les conditions dans lesquelles ces locaux peuvent être utilisés, compte tenu des nécessités de l’administration des propriétés communales, du fonctionnement des services et du maintien de l’ordre public. Le conseil municipal fixe, en tant que de besoin, la contribution due à raison de cette utilisation. »
La loi prévoit ainsi que les associations peuvent utiliser des locaux communaux, sous réserve d’en faire la demande, de respecter les conditions posées par le maire et de verser la contribution financière fixée par le conseil municipal. La jurisprudence administrative apporte des précisions utiles s’agissant des associations cultuelles.
Exercice du culte dans les locaux communaux
Une association cultuelle peut bénéficier de la mise à disposition de locaux communaux pour un usage exclusivement cultuel ou, selon la jurisprudence pour un usage non cultuel à titre accessoire ou occasionnel.
En vertu de la loi du 2 janvier 1907, une association culturelle peut demander à utiliser un espace public pour un usage cultuel.
L’accès à l’utilisation des locaux communaux n’est pas un droit mais une possibilité offerte aux associations. Aucun droit acquis ne naît de l’utilisation précédente d’un local communal (TA Cergy Pontoise, 10 janvier 2006 Témoins de Jéhovah).
Non subvention du culte
Les locaux communaux appartenant au domaine public communal sont utilisés sur autorisation du maire, qui permet une occupation privative du domaine public et ce, à titre temporaire et précaire, révocable à tout moment. La mise à disposition à titre gratuit ou préférentiel est interdite pour une utilisation à des fins cultuelles.
Les locaux communaux appartenant au domaine privé de la commune (soumis à contrat de location de droit privé) ne peuvent être mis à disposition ni gratuitement ni pour une durée indéterminée, ni dans des conditions préférentielles à une ou plusieurs associations cultuelles (C 26 mai 1933, Sieur Russier). La mise à disposition des locaux communaux à une association cultuelle doit se faire aux conditions de marché (CE, 18 novembre 1994). Le fait que le tarif des salles municipales soit plus avantageux que celui des salle privées, ne constitue pas une subvention de la municipalité (CE 30 mars 2007- Ville de Lyon/Témoins de Jéhovah). La participation directe de la commune à l’organisation de célébrations religieuses constituerait, en revanche, une atteinte au principe de laïcité (TA de Châlons-sur-Marne, 18 juin 1996, M. Thierry Come, Association «Agir » c/Ville de Reims).
Égalité entre les citoyens
La commune doit en tout état de cause, sauf si une discrimination est justifiée par l’intérêt général, veiller à l’égalité de traitement entre les associations, syndicats et partis politiques qui sollicitent l’utilisation de locaux communaux, dans sa décision d’octroi ou de refus comme en matière de gratuité ou de contribution fixée pour cette occupation. Dans le cas contraire, la collectivité pourrait se voir opposer la violation du principe d’égalité des citoyens devant la loi, sanctionnée par le juge administratif (CE, 15 octobre 1969, association Caen-Demain, Rec. p. 435).
Légalité du refus du maire
L’évolution de la jurisprudence tend à privilégier l’exercice de la liberté de réunion garantie par l’article 11 de la Convention Européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CE, Ord, 30 mars 2007, Ville de Lyon). Le contrôle de la légalité du refus opposé par les maires aux associations est strict.
Le maire ne peut justifier son refus que par les motifs définis par la loi: «nécessités de l’administration des propriétés communales, du fonctionnement des services et du maintien de l’ordre public» (article 2144-3 CGCT) ou l’intérêt général.
Parmi les motifs injustifiés de refus :
– Le principe de laïcité (TA Marseille 17 octobre 2006).
– «La crainte purement éventuelle que les salles municipales soient l’objet de sollicitations répétées pour des manifestations à but religieux »( CE 30 mars 2007).
– Le seul fait que l’association fasse partie de tel ou tel mouvement auquel la commune ne souhaite pas mettre à disposition de salles (TA Paris 13 mai 2004 et TA Bordeaux 31 mars 2007).
– Le fait que le règlement intérieur des salles municipales ne prévoit pas leur utilisation pour célébrer des manifestations à caractère cultuel (TA Poitiers 24 aout 2004 Témoins de Jéhovah).
En cas de refus, il convient donc d’en demander le motif précis à la mairie. Si le motif ne fait pas partie des motifs définis par la loi, un entretien avec le maire suivi d’un courrier simple est vivement conseillé. Si cette démarche n’aboutit pas, après étude juridique qui conclurait à l’illégalité du refus, vous pourrez tenter un recours administratif en annulation du refus opposé par le maire. La durée d’une telle démarche n’est pas aussi longue qu’on le dit souvent.
Nancy Lefèvre,
juriste de la commission juridique mixte ADD/FEF