L’article juridique du numéro 93 d’InfoFEF par Daniel Bordreuil a suscité un certain nombre de réactions. Quatre personnes ont été consultées pour faire ressortir à la fois l’enjeu du débat et les différents avis.
>QUESTIONS A OLIVIER DUGAND
COORDINATEUR ADMINISTRATIF AU SEIN DE L’ENTENTE EVANGÉLIQUE DES CAEF (COMMUNAUTÉS ET ASSEMBLÉES EVANGELIQUES DE FRANCE). IL ASSURE NOTAMMENT LA GESTION ADMINISTRATIVE, SOCIALE ET FINANCIÈRE DES MISSIONNAIRES, PASTEURS ET DES PERSONNES CEUVRANT À PLEIN TEMPS DANS UN SERVICE CULTUEL. ACTUELLEMENT 70 PERSONNES SONT AFFILIÉES À LA CAVIMAC PAR L’INTERMÉDIAIRE DE CE SERVICE
La retraite de la Cavimac est extrêmement petite, quelles précautions conseillerais-tu pour une « famille pastorale » afin d’envisager plus sereinement leur retraite, sans devoir dépendre de l’aide publique ?
« Si l’affiliation à la CAVIMAC fait presque l’unanimité du point de vue financier, il faut ajouter qu’aucune indemnité n’est assurée en cas d’arrêt maladie pour les personnes affiliées. Il est à souhaiter que l’église assure la continuité du soutien financier, et ce, d’une manière aussi neutre que peut le faire la sécurité sociale. Si, ni le régime général ni le régime CAVIMAC n’obligent aux cotisations ASSEDIC pour les ministres du culte, pour autant il me paraît important de bien en informer les ayants droit (ou plutôt «n’ayant pas droit »…).
Un départ du ministère pour diverses raisons, autre que maladie ou handicap, oblige à une intégration quasi immédiate dans le monde du travail séculier. Il est à souhaiter que l’économie de cotisations pour nos églises n’entraîne pas l’économie d’obligation d’accompagnement.
Pour la retraite, par exemple une personne mariée ayant eu des enfants et ayant cotisé 82 trimestres, le montant mensuel de la retraite serait de 205,64 €. Il apparaît comme une évidence qu’un complément de retraite soit mis en oeuvre pour chaque ressortissant CAVIMAC. »
Conseillerais-tu un produit ?
«Là est la question, et nous sommes en cours de réflexion en ce qui concerne les ressortissants de l’Entente Evangélique des CAEF. Plan d’épargne retraite, plan d’épargne progressif, assurance vie… Les produits sont nombreux et les garanties ne sont pas toujours très lisibles.
Plutôt que de conseiller un produit, il me paraît plus sage et plus facile d’apporter quelques conseils pour éviter le pire.
– Vérifier la fiscalité du produit proposé : versements non soumis à l’impôt sur le revenu, frais d’entrée, fiscalité à la sortie, droits de succession.
– Vérifier le support du produit : le pourcentage d’actions, d’obligations…
– Vérifier la garantie du taux de rendement proposé, est-il en référence à une valeur fluctuante ou est-ce un taux fixe garanti ?
– Vérifier la crédibilité du proposant (autant que faire ce peut).
– Vérifier la disponibilité de votre épargne et son mode de réversion : rente, capital…
Vous ne pourrez pas faire l’économie de la comparaison des propositions qui vous sont faites, soit par les banques, soit par les compagnies d’assurances, de même en ce qui concerne les produits. En final, le choix vous appartient.
L’avenir d’un placement peut vous paraître très incertain. Sachez qu’en ce qui concerne le régime général, et donc les cotisations obligatoires en retraite complémentaire, la seule certitude que nous ayons, c’est le montant des prélèvements actuels.
Prévoir est utile et la Parole de Dieu nous invite à cela de plusieurs manières. Ceci étant, notre confiance reste en Celui qui seul connaît parfaitement nos lendemains, que nous relevions de la CAVIMAC ou du régime général. »
>SERGE GOUT
SECRETAIRE GÉNÉRAL DES AEEI, ET PASTEUR À ORSAY. IL A LONGTEMPS ÉTÉ MEMBRE DU COMITÉ NATIONAL DE LA FEF ET RÉDACTEUR EN CHEF D’INFOFEF.
Que penses-tu de l’adhésion à la CAVIMAC ?
« Bien qu’adhérant moi-même à ce régime, il faut reconnaître qu’il est très défavorable aux pasteurs, et que je ne vois pas comment on pourrait justifier de rendre à terme les pasteurs « SDF », ou vivant de la charité publique, au motif de financer la vie de l’Eglise !
Mon collègue Daniel Bordreuil a évalué la retraite mensuelle maximale versée par la CAVIMAC à une personne ayant cotisé toute sa carrière à 374,88 €1. Je regrette que ce chiffre n’ait pas été inscrit en très gros caractères dans InfoFEF ! Il faudrait ajouter que cette somme sera divisée par deux dès lors que la veuve du pasteur touchera éventuellement sa « pension de réversion » !
L’article évoquait l’importance de cotiser à une « retraite complémentaire de type AGRR » ou d’ouvrir un compte de « retraite par capitalisation ».
Des simulations ont récemment été publiées par la revue de la MAAF d’octobre 2002 dans l’article « La retraite, pensez-y maintenant ». Prenons l’hypothèse la plus favorable : Vous n’avez que 35 ans, et vous pouvez mettre de côté 162,05 € par mois ? Jusqu’à 65 ans? Bravo ! Vous aurez en cumulant vos retraites une somme maximum de 874,88 € par mois (5 740 FRF)! »
Quels conseils donnerais-tu ?
« À mon humble avis :
– Si vous avez la possibilité d’échapper à la Cavimac regardez-y à deux fois avant de rentrer dedans !
– Si vous êtes déjà dedans, cotisez éventuellement à une retraite par capitalisation. Mais qui peut vraiment cotiser suffisamment pour pallier les déficiences de la Caisse des Cultes ?
– Si enfin vous en avez la possibilité, le plus intéressant serait de demander à l’Église locale de vous payer un loyer avec lequel vous chercherez non à louer, mais à acheter votre logement.
D’une part vous placez votre argent dans la pierre et il est rare d’y être perdant; d’autre part les aides au logement représentent sur 20 ans une somme qui viendra s’ajouter purement et simplement à votre patrimoine financier; enfin vous aurez un toit ou un capital pour la retraite. »
>AVIS DE GERALD VERNEUIL, AGENT AXA
MEMBRE D’UNE ÉGLISE UECE OU EXCHRISHONA, CONSEILLER AUPRÈS DE SON UNION D’ÉGLISES, AGENT GÉNÉRAL A AXA.
« La Cavimac n’est pas le seul régime à poser problèmes. Il y a aussi des avantages, en effet dans les cotisations versées à la Cavimac on ne perd rien. Depuis peu on ne cotise plus à l’ARRCO, ce qui est une chance. En effet l’ARRCO ne va pas très bien. En cessant la cotisation ARRCO, les économies générées peuvent financer un régime qui tient la route par une retraite par capitalisation. Par exemple à l’Union des Églises Chrétiennes Évangéliques, nous travaillons à mettre en place une retraite décente pour les pasteurs. J’ai pu négocier avec ma direction des produits très compétitifs. »
>AVIS DE JEAN-DANIEL SCHULTZE
AGENT DU GROUPEMENT D’ASSURANCE PROTESTANT
« Pour ma part, je préfère encourager les pasteurs à cotiser au régime général plutôt qu’à la CAVIMAC qui est un régime conçu à l’origine pour les prêtres et les soeurs du clergé catholique (donc qui n’ont pas de famille à charge). Les produits proposés par les compagnies d’assurance ne sont pas toujours très fiables. Personne ne peut savoir ce qui se passera dans 30 ans. J’ai toujours opté pour l’option « retraite pierre », c’est-à-dire l’Église achète un appartement pour le pasteur, le capital sera revalorisé et préservé. Vous voyez aujourd’hui que la bourse chute fortement, et en revanche l’immobilier est plus stable. En complément de l’immobilier, on peut prendre différents produits d’épargne (il ne faut surtout pas mettre tous les oeufs dans le même panier).»
Propos recueillis par Reynald Kozycki
NOTE
1 Voir InfoFEF, n’93. septembre 2002