« …Barnabas, ce qui signifie fils d’exhortation, Lévite, originaire de Chypre, vendit un champ qu’il possédait, apporta l’argent et le déposa aux pieds des apôtres » (Actes 4.36-37).
Quelle partie de votre corps vous suggèrent en priorité les mots exhorter, encourager, consoler, réconforter ? Personnellement, je pense aussitôt à ce petit organe charnu à dominante rose, long d’une dizaine de centimètres, pesant environ soixante grammes, qui se tient la plupart du temps à l’abri des regards, véritable acrobate dans la production de sons vocaux…
Vous avez devine sans peine qu’il s’agit de la langue.
Or, surprise ! la première mention de Barnabas dans le livre des Actes nous le présente utilisant un tout autre « organe » particulièrement sensible, plus ou moins épais, lui aussi véritable acrobate en son genre selon les circonstances. C’est son porte-monnaie ou plutôt son portefeuille qu’il met en action, cet incontournable prolongement de la personne, qui fait généralement corps avec elle. Ce n’est pas sa bouche qu’il ouvre tout grand pour en extraire des tonnes d’exhortations et de conseils, mais son portefeuille bien garni pour l’occasion et dont il vide le contenu aux pieds des apôtres, sans tambour ni trompette. En compagnie d’autres croyants (v. 34-35) il apporte bien volontiers une aide financière substantielle pour encourager des frères en difficulté. Son soutien n’est pas simplement verbal, mais très concret, pratique, matériel. C’est un plaidoyer en actes !
DIEU ET MON PORTEFEUILLE |
Voilà qui touche à un endroit très sensible de notre « anatomie » ! C’est avec Juste raison que Luther a dit que trois conversions étaient nécessaires celle du coeur, celle de la pensée et celle du porte-monnaie. Ceci me rappelle l’histoire de ce candidat au baptême qui entre lentement dans l’eau lorsque soudain il réalise que son portefeuille est en danger d’inondation catastrophique dans la poche arrière de son pantalon. Avec l’énergie du désespoir il s’efforce de l’en déloger pour le mettre à l’abri. Finalement, d’un geste triomphant, le néophyte soulagé brandit le précieux trouble-fête pour l’envoyer en lieu sûr, lorsque la main ferme du pasteur s’empare du poignet vainqueur, stoppant net l’élan libérateur. Comme un coup de tonnerre dans un ciel en fête, la sentence suprême retentit sous les regards à la fois émus et amusés des spectateurs de la scène : « Ton portefeuille doit être baptisé lui aussi ! ».
Le regretté A.W. Tozer a dénoncé en termes particulièrement vigoureux la tendance généralisée à la cupidité qui se tapit au fond du coeur humain « Il ne fait aucun doute que l’attachement à la possession des choses matérielles constitue l’un des penchants les plus pernicieux de la vie. Et comme il semble si naturel et qu’il est si répandu, il est rarement dénoncé comme un mal. Pourtant ses effets sont néfastes et tragiques. Cette calamité tenace, aussi vieille que l’humanité, ne peut être extirpée sans souffrances et sans peines. L’avare coriace, que nous abritons tous en nous, ne déposera pas les armes et n’acceptera pas de mourir tout simplement en obéissance à un ordre donné. Il doit être extirpé, arraché de notre coeur comme on arrache une plante du sol, extrait dans le Sang et la douleur comme on arrache une dent. Il doit être chassé de notre âme comme Christ a expulsé les changeurs de monnaie du temple »1.
Effectivement, notre portefeuille et tout ce qui s’y apparente, cartes de crédit, carnets de chèques, actions, meubles et immeubles…, tous ces biens sans exception doivent passer par la porte basse et étroite de la Croix ! Nous connaissons le contenu du premier et du plus grand de tous les commandements de Dieu, plusieurs fois cité dans la Bible « Tu aimeras l’Eternel ton Dieu de tout ton coeur, de toute ton âme et de toute ta force » (Deut. 6.5). Une des traductions araméennes de ce passage remplace la dernière expression « ta force » par « Mammon », c’est-à-dire avec ton argent, ta fortune, Mammon étant la personnification de la richesse2. Ce n’est pas pour rien que Jésus a donné une grande place à l’argent dans son enseignement, D’après J. Oswald Sanders, « celui-ci est présent d’une façon ou d’une autre dans un verset sur six dans les Evangiles synoptiques, et dans seize des trente-huit paraboles »3.
AIMER EN ACTION |
« Petits enfants, n’aimons pas en parole ni avec la langue, mais en action et en vérité » (1 Jean 3.18). « Si un frère ou une soeur sont nus et manquent de la nourriture de chaque jour, et que l’un d’entre vous leur dise : Allez en paix, chauffez-vous et rassasiez-vous ! sans leur donner ce qui est nécessaire au corps, à quoi cela sert-il ? Il en est ainsi de la foi si elle n’a pas d’oeuvre, elle est morte en elle-même » (Jac. 2.15-17). J’ai lu quelque part l’anecdote concernant un croyant qui, librement et simplement, faisait part de sa situation matériellement difficile à un membre de son Eglise dans un pays scandinave. Ce dernier, voulant l’encourager, crut bon de lui rappeler, sans doute avec un regard et un ton angéliques, le caractère passager des problèmes humains et la perspective céleste, avec ses vêtements blancs et ses couronnes, dans laquelle il fallait vivre pour pouvoir triompher de toutes les difficultés… Notre ami en peine lui tendit alors la main et répondit à peu près ceci « En attendant que je reçoive ma couronne dans le ciel, n’auriez-vous pas une demi-couronne4 à m’offrir pour mes besoins terrestres ? »
Samuel Bradburn, un collaborateur du revivaliste anglais bien connu John Wesley (1703-1791), se retrouva un jour dans une situation financière plutôt désespérée. Wesley l’ayant appris lui envoya un chèque accompagné des lignes suivantes « Cher Sammy, «confie-toi en l’Eternel et pratique le bien , aie le pays pour demeure et la fidélité pour pâture» (Psaume 37.3). Affectueusement en Christ, John Wesley » La réponse de Bradburn ne se fit pas attendre « Cher Monsieur Wesley. J’ai souvent été frappé par la beauté du passage biblique que vous avez cité dans votre lettre, mais je dois avouer que je n en avais jamais vu un commentaire aussi pratique auparavant ».
Un vendeur ambulant de fruits et légumes passait régulièrement devant le domicile d’un chrétien. Un jour, il laissa tomber un petit carnet de notes que le croyant ramassa aussitôt pour le lui remettre. Sur la première page figuraient ces quelques mots « Pour son corps, qui est l’Eglise » suivis de toute une liste de noms de personnes et de services à rendre : « Ces personnes étaient absentes de l’étude biblique dominicale, n’oublie pas de leur rendre visite. Informe-toi au sujet du bébé malade. Laisse des fruits à la dame aveugle. Donne une parole d’encouragement au vieil homme infirme ». Lorsque le vendeur récupéra son carnet, il expliqua modestement : « Vous voyez, c’est le carnet dans lequel j’écris ce que je ne dois pas oublier ». Montrant du doigt la première page, il ajouta : « Voilà pourquoi je fais cela «Pour son corps, qui est l’Eglise». Cela empêche mon âme de s’empoussiérer , parce que j’encourage ses enfants, je sais que c’est lui que je sers »5.
VIVE LA GRACE ! |
Revenons à Barnabas dont le geste est d’autant plus éloquent qu’il a pu être tenté de se refugier pieusement dans l’ancienne alliance pour conserver précieusement ce bien, en se réclamant tout simplement de son statut de lévite, dans la mesure où le champ qu’il possédait se trouvait probablement en bordure de Jérusalem6 puisqu’il avait là une soeur, ou du moins une proche parente, Marie mère de Jean surnommé Marc (Actes 12.12 et Col. 4.10). « Les champs situés dans les abords de leurs villes ne pourront pas se vendre , car ils (les lévites) en ont la propriété perpétuelle » (Deut. 25.34). Il aurait pu prétexter intérieurement la nécessité d’obéissance à cet article de la loi mosaïque le concernant directement, mais il sait fort bien que dans sa vie, cet aspect de la loi est devenu caduque à l’instant même ou il s’est entièrement donné à Jésus-Christ. Désormais, il vit sous le règne de la grâce, sous la loi de Christ. D’ailleurs, juste avant que Barnabas nous soit présenté pour la première fois en fils d’encouragement, le texte biblique nous invite déjà à regarder en direction de la grâce : « Une grande grâce reposait sur eux tous. Car il n’y avait parmi eux aucun indigent, tous ceux qui possédaient des champs ou des maisons les vendaient… » (Actes 4.33-35).
Lorsque l’apôtre Paul fait appel à la générosité des Corinthiens en vue de la collecte destinée aux chrétiens de Jérusalem, il introduit ses exhortations et ses instructions en donnant les Eglises de la Macédoine en exemple (2 Corinthiens 8 et 9). Au lieu d’utiliser comme excuses les multiples détresses qui les éprouvaient, au lieu de se réfugier derrière leur extrême pauvreté, ces croyants ont fait preuve d’une très grande générosité, allant même spontanément au-delà de la limite de leurs moyens. Paul décrit leur démarche en ces termes « ils nous ont demandé avec beaucoup d’insistance la grâce de participer à ce service en faveur des saints » (8.4).
Examinons les mots clés contenus dans ce verset pour en tirer quelques enseignements :
- Comme Barnabas, les chrétiens macédoniens vivaient sous le règne de la grâce. Ils considéraient comme une immense faveur la possibilité qui leur était offerte d’encourager concrètement leurs frères et soeurs de Jérusalem. Voilà qui nous remet en mémoire nos réflexions sur la charis et les charismes dans le chapitre précédent. Leur attitude était totalement dépourvue de calculs intéressés, de marchandage avec Dieu pour mériter ou gagner le salut, ou encore pour recevoir une quelconque bénédiction en retour de leurs bonnes oeuvres. Leur geste d’amour était avant tout un acte de reconnaissance envers Dieu à cause de la grâce surabondante qu’il leur avait faite (9. 14) « Vous connaissez la grâce de notre Seigneur Jésus-Christ qui pour vous s’est fait pauvre de riche qu’il était, afin que par sa pauvreté vous soyez enrichis » (8.9). Comme l’apôtre Paul le souligne à deux reprises, dans leur esprit, participer à ce service c’était prendre part à une « oeuvre de grâce« (8.6 et 7) qui allait avoir « pour résultat des actions de grâces envers Dieu » (eucharistia , 9.11).
- Ils ont réclamé cette faveur « avec beaucoup d’insistance », en grec « meta pollés paraklèseôs« . Nous reconnaissons sans peine l’un des mots de la famille du « paraclet« . Cela signifie qu’ils ont plaidé de tout leur coeur, comme un avocat enflammé dans une vibrante plaidoirie, alors qu’il tente désespérément par ses arguments et son éloquence de sauver la tête de son client condamné à la peine capitale. Telle était l’expression de leur profonde consécration au Seigneur qu’ils servaient avec passion « Ils se sont d’abord donnés eux-mêmes au Seigneur et à nous, par la volonté de Dieu » (v. 5). Leur soutien financier était le fruit d’une profonde conviction intérieure forgée dans l’intime présence d’un Dieu qu’ils aimaient profondément.
- Ils ont demandé la grâce de la participation, de l’assistance à ce service en faveur des saints. Voilà qui demande un plus long développement. Le mot koinônia utilisé ici et dans Romains 15.26 où il est rendu par « collecte » – le texte fait allusion au même événement que 2 Corinthiens 8 et 9) apparaît 19 fois dans le Nouveau Testament et est souvent traduit par « communion ». Il appartient à une famille de 7 mots dérivés de l’adjectif koinos, commun, présents une cinquantaine de fois dans le texte biblique. En réalité aucun mot français ne recouvre complètement la diversité des sens qu’il peut avoir en fonction du contexte dans lequel il est employé. C’est un mot à portée dynamique, que le grec profane utilise pour décrire l’action de partager, de participer à quelque chose, d’avoir un rapport, une affinité avec quelqu’un. Il peut être employé pour évoquer la mise en commun de biens matériels, l’association avec une ou plusieurs autres personnes (y compris dans un cadre juridique clairement établi), l’entretien d’une étroite amitié ou de relations intimes comme celle du mariage. Par extension il peut être rendu par les mots sympathie, compassion, aumône. En résumé, les termes association, communication, participation, contribution, collecte, aumône, assistance, libéralité conviennent bien pour exprimer ses contenus possibles. Dans le Nouveau Testament, j’ai relevé 11 passages dans lesquels koinos et ses dérives contiennent une dimension de mise en commun des biens matériels7. Dans Actes 2.42, la communion fraternelle qui faisait partie de « la quadruple persévérance » de l’Eglise primitive à Jérusalem avait inévitablement une dimension de solidarité matérielle, soulignée au verset 44, ils « avaient tout en commun« , et au chapitre 4, verset 32, « tout était commun entre eux ». Pour bien montrer la portée dynamique de la koinônia, quelqu’un a choisi de l’illustrer par deux mains qui non seulement se joignent l’une à l’autre, mais s’interpénètrent. Une telle solidarité est facteur de solidité et d’unité de l’Eglise locale. S’il est facile de séparer deux mains collées l’une à l’autre paume contre paume, il est très difficile de disjoindre deux mains dont les doigts restent obstinément entrelacés, au risque même d’aboutir à la fracture d’une ou de plusieurs phalanges.
- L’acte de générosité, de soutien et d’encouragement de Barnabas tout comme celui des Eglises de la Macédoine s’inscrit donc dans le paysage d’une véritable communion fraternelle, bien comprise, c’est-à-dire vivante et dynamique, active et entreprenante, concrète et pratique entre croyants et entre églises locales, au sein du peuple de Dieu. Concernant Barnabas, il est intéressant de relever un court passage de la suite du livre des Actes, relatif à son témoignage bien des années plus tard. Un verset y souligne indirectement la constance de son ministère d’encouragement dans le cadre de cette communion fraternelle vivante et agissante, conforme à la pensée de Dieu. Le texte d’Actes 11: 27-30 nous apprend en effet qu’en l’an 46 une grande famine s’abattit sur le monde romain, sévissant aussi en Palestine. Barnabas fit alors équipe avec Saul, le futur apôtre Paul, pour apporter aux anciens de l’Eglise de Jérusalem le fruit d’une collecte organisée au sein de l’Eglise d’Antioche en faveur des frères éprouvés habitant la Judée.
- L’encouragement mutuel vu sous l’angle du soutien financier et matériel est un acte de consécration. On paye de sa personne ! Cela coûte quelque chose ! Connaissez-vous l’histoire de la poule et du cochon qui passaient devant une église lorsque leurs regards furent accrochés par un grand panneau annonçant un repas spécial avec des oeufs au jambon, dont la recette serait envoyée à une Mission. La poule aussitôt de caqueter avec enthousiasme « Excellente idée ! Je crois que je vais y aller ». Et le cochon alors de grogner sombrement en fronçant son groin « C’est une décision bien facile pour toi. Toi, tu n’as qu’à donner une offrande. Moi, je dois faire un sacrifice ! ». Bien que Sa Parole soit extraordinairement efficace, Dieu n’a pas seulement parlé aux hommes. Il ne s’est pas contenté de nous aimer avec des mots, aussi riches soient-ils ! « Dieu prouve son amour envers nous lorsque nous étions encore pécheurs, Christ est mort pour nous » (Rom 5.8). La grâce de Dieu n’est pas une grâce à bon marché ! Elle a coûté très cher à notre Père céleste et à son Fils bien-aimé, en larmes, en souffrances, en coups, en sang répandu sur la croix. Le prix de la rançon exigée pour payer ma dette envers Dieu et sa loi était très élevé. Personne d’autre que Jésus-Christ dans le cosmos tout entier n’avait la capacité de payer un tel prix. Et il l’a fait par amour pour moi, et pour vous, cher lecteur ! Quelle est notre réponse concrète ? « Ne vous attendez donc pas à des expériences extraordinaires. Que votre christianisme devienne pratique. Prends le bon livre qui t’a été en bénédiction, donne-le à un autre, et ta vie commencera à déborder…, mets au service de ton entourage ton obéissance envers Dieu, tes prières, donne aux autres un regard de sympathie, une parole amicale, une aide affectueuse, et ta vie commencera à déborder. Aime ceux qui ne t’aiment pas, ne te fâche pas lorsqu’on se fâche contre toi, supporte l’injustice, et ta vie commencera à déborder »8.
TROIS MISES EN GARDE |
Non à toute récupération politique douteuse. Est-il bien nécessaire de préciser ici que cette solidarité d’amour à l’oeuvre dans l’Eglise primitive et brièvement décrite dans Actes 2.44-45 et 4.32-37 n’a rien à voir avec un quelconque idéal communiste ou de la même veine dont les zélateurs ont tenté de s’approprier le texte biblique pour en tordre le sens à leur profit ? « Quand le communisme moderne s’est appuyé sur ce récit, il a confondu une ardente charité avec son esprit niveleur. Le communisme biblique dit ce qui est à moi est à toi : l’ autre dit ce qui est à toi est à moi. L’un dit : ce que j’ai, je te le donne, l’autre donne-moi ce que tu as »9.
Non à un littéralisme excessif. Une mise en garde s’avère aussi nécessaire à l’endroit de tous ceux qui seraient tentés de donner à cette forme d’expression particulière et exceptionnelle de la koinônia dans l’Eglise de Jérusalem à l’aube de son histoire, une quelconque valeur normative. Une mauvaise approche de ce récit historique, souvent par souci de fidélité à la lettre de l’Ecriture Sainte, a conduit plus d’une communauté à se fourvoyer dans des entreprises dangereuses aboutissant à des aberrations aux conséquences hélas parfois catastrophiques et profondément dommageables pour le témoignage chrétien. Il convient de tirer de ce récit des principes spirituels concernant l’amour fraternel et la gestion des biens tels qu’ils sont précisés et confirmés par l’enseignement des Evangiles et des Epîtres. Comme nous le verrons ultérieurement, l’encouragement et le soutien mutuels nécessitent beaucoup de sagesse, de discernement et de bon sens, une soigneuse prise en compte des temps et des moments, des lieux et des circonstances, pour ne pas sombrer en caricature favorable aux desseins de Satan, celui que Martin Luther surnommait, avec raison, « le singe de Dieu ».
Non à la triche. A peine venons-nous d’évoquer le danger et le piège de la caricature que déjà elle pointe le bout de son nez, s’inscrivant dans le sillage immédiat du beau témoignage de notre ami Barnabas. Car il serait bien imprudent d’arrêter notre lecture au dernier verset du chapitre quatre comme si le début du chapitre suivant lui était totalement étranger ! Le « mais » qui introduit le terrible épisode consacré à Ananias et Saphira jette un pont entre les deux chapitres, mais creuse un fossé profond entre deux manières totalement opposées d’envisager et de vivre le service de l’encouragement par le soutien matériel. Il vient s’inscrire à cet endroit précis comme un signal d’alarme, une sorte de voyant rouge qui s’allume au tableau de bord de cette toute jeune Eglise. Il annonce et souligne l’absolu contraste entre deux actions d’encouragement identiques à première vue sauf pour le regard spirituel aiguisé de l’apôtre Pierre. Ne se laissant pas piéger par les apparences, ce dernier discerne très vite derrière le geste généreux, la contrefaçon, le plagiat douteux de la part de ceux qui peut-être admirent, envient, jalousent secrètement le rayonnement de ce Joseph au si beau surnom.
* Ananias et Saphira laissent croire au complet détachement des biens de ce monde par consécration au Seigneur et par amour pour les frères. Mais ce n’est que de la poudre aux yeux destinée à une cour d’admirateurs superficiels dont ils attendent un roucoulement de louanges, à défaut d’approbation divine.
* Ananias et Saphira voudraient bien qu’il soit dit haut et fort qu’ils servent un seul Maitre de tout leur coeur, alors qu’en réalité ils pensent pouvoir réaliser l’exploit impossible d’en servir deux à la fois, dans l’écartèlement de leur coeur partagé.
* Ananias et Saphira n’agissent pas sous l’inspiration de la grâce de Dieu, qui se traduit en actes de générosité libres et volontaires mais sous celle de la loi oppressante de l’orgueil, lequel les oblige à paraître généreux tout en leur imposant son arithmétique froide et sans âme.
* Ananias et Saphira, dans leur générosité de façade qui prétend être guidée par l’amour de Dieu et des frères alors qu’elle est gangrenée par l’amour de l’argent, nous mettent solennellement en garde, bien malgré eux, contre le péché d’hypocrisie.
* Ananias et Saphira succombent à la tentation de la triche, de la contrefaçon et du bricolage de l’amour, parce que leurs motivations profondes sont impures, charnelles, d’en-bas. Ne vivant pas sous le règne de la grâce, ils ne profitent pas non plus de la liberté royale des enfants de Dieu qui servent leur Père sans calculs intéressés, mais avec joie et simplicité, sincérité et vérité.
« Que chacun donne
comme il l’a résolu en son coeur,
sans tristesse ni contrainte ;
Car Dieu aime
celui qui donne avec joie.
Et Dieu a le pouvoir
de vous combler
de toutes sortes de grâces,
afin que possédant
toujours à tous égards
de quoi satisfaire à tous vos besoins,
vous ayez encore en abondance
pour toute oeuvre bonne…
Grâces soient rendues à Dieu
pour son don ineffable ! »
(2 Corinthiens 9.7-8, 15)
Maurice DECKER
(Ces lignes sont tirées de l’ouvrage
« Barnabas, tu m’encourages ! »)
NOTES
1 Cité par G. Verwer dans Cap sur le but, Farel, 1986, pp.33-34.
2 CERT. France, Le Dieu vivant, Mission Prière et Réveil, 1991, p.60.
3 J.O. Sanders, Paul, meneur d’hommes, Vida, 1987, p.158.
5 Les deux dernières anecdotes sont tirées de méditations de Notre pain quotidien, Radio Bible Class, Québec.
6 Ce champ pouvait aussi se trouver dans l’ile de Chypre dont Barnabas était originaire.
7 Ce sont : Actes 2.42,44 ; 4.32 ; Romains 12.13 ; 15.26 ; 2 Corinthiens 8.4 ; 9.13 ; Galates 6.6 ; Philippiens 4.15 ; 1 Timothée 6.18: Hébreux 13.16.
8 G. Steinberger, Petites Lumières, Mission Prière et Réveil, 1952, p.45.
9 L. Bonnet, Bible Annotée, NT 2, Jean, Actes, P.E.R.L.E. Emmaüs, p.353, colonne 2.
Table des matières
1e PARTIE : Barnabas, l’amour de Dieu dans un corps
(Actes 4.36-37)
1. L’ENVOI DU CONSOLATEUR………………………………………………………………………………………..19
2. UN BEAU SURNOM
L’homme qui encourage – Le charisme de l’encouragement – Quel est mon surnom ?…………….33
3. PLUS QUE DES MOTS
Dieu et mon portefeuille – Aimer en action – Vive la grâce! – Trois mises en garde………………..43
2e PARTIE : Barnabas, un bâtisseur de ponts
(Actes 9.26-27)
4. UN ACCUEIL JUSTE ET BON
Faites-vous mutuellement bon accueil……………………………………………………………………………….57
5. UNE LANGUE SOUMISE AU SAINT-ESPRIT
Vérifiez les bruits qui courent……………………………………………………………………………………………71
6. UN REGARD SOUPLE ET UN COEUR SENSIBLE
Refusez la sclérose du regard – Ne brûlez pas les étapes………………………………………………………87
7. UNE ÉCOUTE DE QUALITÉ (1)
Ecoutez et comprenez : Une écoute qui coûte………………………………………………………………………97
8. UNE ÉCOUTE DE QUALITÉ (2)
Ecoutez bien pour parler juste : oreille exercée, langue exercée………………………………………….107
3° PARTIE : Barnabas et le regard de la grâce
(Actes 11.19-26)
9. PRIORITÉ À LA GRACE DE DIEU………………………………………………………………………………..119
10. PRIORITÉ AUX ACTIONS DE GRÂCES………………………………………………………………………133
11. LE BON ACCUEIL DES DIFFÉRENCES……………………………………………………………………….145
12. LES NUANCES DE LA GRACE
Grâce et support mutuel – Grâce et liberté chrétienne-Grâce et joie…………………………………….161
13. PLÉNITUDE ET FRUIT DE L’ESPRIT
Un homme bon – Un homme plein d’Esprit Saint……………………………………………………………….177
14. PLÉNITUDE DE FOI
Un homme de vision……………………………………………………………………………………………………….195
4e PARTIE Barnabas et l’esprit d’équipe
(Actes 13 à 15.40)
15. LE MENEUR ET SON ÉQUIPE
Le prophète, le docteur, et l’aide………………………………………………………………………………………213
16. CHACUN À SA PLACE
L’esprit d’équipe – Une heureuse complémentarité – L’esprit de serviteur……………………………223
17. BIEN GÉRER NOS DÉSACCORDS
L’analyse d’un conflit – Evaluation…………………………………………………………………………………..241
18. PERSÉVÉRER DANS L’ENCOURAGEMENT
Les fruits de la persévérance de l’amour – Voir loin…………………………………………………………..257
5e PARTIE Barnabas, un homme comme nous
Trois fleurs splendides dans le vase de cristal de l’encouragement
(Galates 2.11-14)
CONCLUSION : UN TRIPLE ENCOURAGEMENT SALUTAIRE
L’incident grave d’Antioche – Trois derniers encouragements…………………………………………….271